Paroles

Une insoutenable douleur me prit au cœur. Mes yeux se froncèrent. Je sentis le froid de la nuit et la pluie glacée sur mon visage. Les souvenirs me revinrent à l’esprit... Le katana plongé dans mon cœur, ma peau refermant autour de lui. Après ce fut le trou noir !
« Tu m’as retenu en te blessant, presqu’à en mourir. Tu m’impressionnes ! Tu es faible. C’est pathétique. » murmura Belzébuth avant de se rendormir.

Mes yeux s’ouvrirent d’un coup. Quelqu’un. A côte de moi. Je me relevais, aussi net et frais que s’il ne s’était rien passé. Mon regard se posa tout autour de moi. Il s’arrêta sur une jeune femme allongée à mes côtés. De longs cheveux bleu perle cachaient son visage. Que faisait-elle là ? Je dégageais ses cheveux et put l’admirer.

" Elle est jeune… et belle " soufflais-je.

Je sus, en apercevant ses oreilles à quel rang elle appartenait. Elle était aussi pure et belle que Sixtine. Mais de façon différente. Je ramassais mon katana à quelques pas de là, je passai mes bras sous son corps affaibli et la soulevai. Il pleuvait depuis un certain temps déjà puisque le sol était extrêmement boueux. Mon sang déversé avait prit le chemin d’un petit canal tracé dans la terre. Je déployai mes ailes et pris mon envol. J’avais marché pendant une heure, mais par la voie des airs, je ne mettrais pas plus de trente minutes.

De retour dans ma forêt protectrice, je déposais l’intrus dans mon lit improvisé. Je m’éloignais d’elle pour aller chercher de l’eau à la rivière. Sur le chemin, je pus laisser libre cours à mes pensées. J’avais apprit depuis quelques jours, que Sixtine avait été emmenée aux Enfers par Shinta. Il me fallait une excuse pour retourner dans cet endroit sans éveiller les soupçons de mon père et de ma sœur sur mes sentiments pour cette humaine. Je connaissais assez les leurs, pour savoir que je devais ne rien leur révéler à propos des miens. J’avais déjà ma petite idée sur ce sujet, mais pour que ce dernier marche, il fallait qu’elle soit d’accord…

Je revins de la rivière. La nouvelle venue dormait encore. D’ordinaire, je n’aurais toléré aucun étranger sur mon territoire, mais pour je ne sais quelles raisons, cette elfe m’avait inspiré de la confiance. Je m’assis près d’elle en apportant le seau d’eau avec moi. J’arrachais trois plumes de mes ailes et leur fis prendre la forme du bol. Je les plongeais ensuite dans l’eau froide et laissait celle-ci se déverses avec douceur sur le visage de cette jeune femme…

Le soleil se levait... Ces rayons perçaient les feuilles. Une sensation douce et fraîche sur mon visage... Une présence ... Il y avait quelqu'un à mes cotés...



Ce prénom, soufflé sans réfléchir... L'avait-il entendus? J'entrouvris alors mes yeux pour voir... Brusquement j'attrapai ma dague en me relevant, la pointant vers cet étrange personnage.

*La chose que j'ai aidée... Serai-ce lui ?*

Pendant l'action j'avais repoussé l'eau qu'il me versait si gentiment sur le visage. Des ailes , des cornes ... Asses d'arguments pour m'en méfier. Je le regardais droit dans les yeux... Une larme coulait sur ma joue... Il ne bougeais pas, me fixant, l'air sur son visage le trahissais , il semblais étonné... Ma première tentative pour me lever était la bonne... Il essaya de m'aider.



Un violant mal de tête me pris, puis, une seconde après de nouveau une absence, la tête baissée j'essayais tant bien que mal de rester en équilibre. Ma dague était à tomée... Je me tenais la tête de mes deux mains. Souffrance, atroce souffrance, je poussais des cris laissant entendre ma douleur. Maintenant a genoux, je me recroquevilla, la tête entre les genoux, je gémissais... Mes cheveux laissaient ma nuque à l'air libre. Une douce chaleur sur celle-ci vint se poser..

Elle s'était levée et tout ce qu'elle avait fait s'était passé à une rapidité fulgurante. Je n'avais pas encore saisit tout ce qu'il s'était passé, qu'elle était déjà à terre, recroquevillée sur elle-même, se tenant la tête de ses deux mains. Je m’approchai d’elle et m’accroupis. Mon visage arrivait juste au-dessus de sa nuque. Je posais mes mains sur ses épaules pour l’aider à se relever et à se rasseoir sur mon lit.

« Je vais répondre aux questions que tu dois te poser, mais je serais bref et rien ne sera répété. Alors concentre-toi et fais abstraction de la douleur, dis-je d’une voix calme et douce. Je suis démon et Prince des Enfers. Si j’étais mauvais, tu serais déjà morte après une torture atroce. Je ne te veux aucun mal. Tu m’as sauvé, j’ai fait de même… »

Après avoir prononcé ces mots je m’éloignais d’elle pour qu’elle reprenne ses esprits tranquillement. Tout comme je l’avais fait avec Sixtine, je ne me lassais pas de l’admirer. C’était la première fois que je voyais un elfe, autre part que dans mes livres. Mais elle ne ressemblait pas exactement à ces créatures. On aurait dit qu’elle avait des airs d’humains. J’attendais qu’elle me réponde, mais elle n’en fit rien pour l’instant…

« Je te laisse libre choix de partir ou de rester. Si tu pars, je ne veux jamais te revoir, et sache que mon territoire s’étend sur une grande surface. Si tu restes… je n’y trouves pas d’inconvénients. J’aurais de la compagnie. » j’avais expliqué tout cela avec calme et mes derniers mots furent prononcés avec un sourire suppliant.

Je me rassis en face d’elle adossé à un arbre. Je mis ma tête en arrière et fermai les yeux en attendant son choix. Partir ou rester…

Elle m’avait répondu. Sa voix, si douce, tremblait. Sûrement à cause de la crainte ou de l’hésitation. A sa première phrase, j’avais ouvert les yeux et à la seconde, j’avais tenté de les plongé dans les siens. Mais ils étaient fermés et elle avait la tête basse. Lorsqu’elle prononça sa dernière phrase, un sourire naquit sur mes lèvres. J’éprouvais un sentiment. Mais lequel ? Je ne savais pas les distinguer.

Je me levai et m’approchai d’elle. Je m’accroupi en face d’elle pour me mettre à sa hauteur. Doucement, je glissais ma main sur sa joue pour effacer la trace de la larme qui avait coulé avant sa tentative d’attaque. Sa peau était glacée, elle devait avoir froid et être trempée jusqu'aux os. Je pris la couverture et la mis sur ses frêles épaules. Puis je me relevai, je commençai à partir mais je stoppai ma marche. Je restais dos à elle et jetai un regard par-dessus mon épaule.

« Tu as choisit de rester, je suis content. Mais tu ne peux pas revenir sur ton choix sans que je le veuille. Ta vie va changer… Je pars chasser, je ne serai pas long. Fais ce que tu veux, mais ne t’éloigne pas, dis-je d’une voix plus sèche que celle avec laquelle j’avais prononcé mes douces paroles. Je suis content. »

Mes derniers mots furent prononcés dans un murmure à peine audible qui m’était plus adressé qu’à elle. Je marchais encore un peu avant de déployer mais ailes, puis je pris mon envol dans un nuage de poussière. Arrivé à la cime des arbres, je me retournais pour la voir. Elle était encore assise sur mon lit avec la couverture sur ses épaules. Je me mordis la lèvre inférieure et parti. J’aurai peut-être du la mettre au courant de mon plan. C’était tout de même elle qui jouait le rôle de la pièce maîtresse.

« Si elle ne veut pas, j’utiliserai la manière forte ! »

J’avais essayé de prononcer ces mots sur un ton qui se voulait autoritaire, de façon à me persuader moi-même de cela, mais c’était peine perdue. La seule chose qui était capable de faire du mal en moi était Belzébuth. J’avais aperçu une proie et je commençais ma descente. Je m’arrêtais sur la branche d’un arbre pour l’observer… C’était une biche, mais elle se portait bien. Pour ne pas perturber la faune, je ne tuais que des animaux affaiblis, âgés ou malade. Je repris ma route en ne faisant aucuns bruits pour ne pas perturber l’animal.

Je me retournais sans cesse l’idée dans ma tête… Si elle refusait, c’était peine perdue que de la garder avec moi et de l’emmener aux Enfers. Il fallait à tout prix qu’elle accepte. Je vis un sanglier couché sur le flanc. Celui-ci devait être drôlement affaibli pour être seul et dans cette posture. Je me posais au sol, il ne bougea pas, je m’approchais de lui.

« Je vais mettre fin à tes souffrances mon grand, » murmurais-je.

Je pris mon katana et le planta d’un seul coup dans sa gorge. Après l’avoir enveloppé et mis sur mes épaules, je repris mon vol en direction de mon chez moi. Je pus me replonger dans mes pensées. Si elle avait accepté de rester, c’était dans quel but ? Peut-être qu’elle ne verrait pas d’inconvénients à être ma possession aux Enfers...

Arrivé au-dessus de l’endroit où je l’avais laissé, je redescendis et posai le cadavre au sol. J’allumais un feu et dépeçai la bête avant de la mettre à rôtir. Je me relevai et regardai le ciel. Il était clair et sans nuages. Il allait faire beau. Une brise légère vint secouer mes cheveux. Je le laissais faire en fermant les yeux. Quand elle s’arrêta, je rouvris les yeux et m’aperçu que je n’avais prêté aucune attention à l’elfe assis à quelques mètres de moi. Je tournai la tête et plongeai mes yeux dans les siens avant de m’en approcher…

« Prête à utiliser ta dague pour me tuer. Je ne vois en quoi ça t’avancerais… » dis-je d’un ton moqueur.

Je n’avais pas eu de compagnie depuis longtemps. Je n’appréciais pas tant ça d’ordinaire, mais je ne sais pas pourquoi, elle, je voulais qu’elle reste. Le fait que je n’ai parlé à personne depuis tout ce temps m’avait fait perdre toute mes bonnes manières. Les mots qui s’échappait de ma gorge était prononcés sur un ton sec et peu engageant. Je m’approchais encore d’elle. Elle avait les yeux fixés sur mes mains. Je les regardai. Elles étaient couvertes du sang de l’animal. Je me dirigeais vers le seau pour les rincer. L’eau était devenue rouge. Je fis demi-tour et retourna près du feu.

« Je sais ce à quoi tu penses : « Il a tué ce pauvre animal. »… sache que c’est mon repas quotidien et qu’il était condamné. » dis-je d’une voix qui se voulait douce.

Je me relevai, regardai de nouveau le ciel et me tourna vers elle :

« Je suis bête. Tu ne manges peut-être pas ça toi… En temps normal, je t’aurai dit de partir chercher ton repas, mais tu es encore affaibli. »

J’attendais une réponse. En me relevant, je sentis son regard posé sur moi, il me glaça le sang.

« Laisse tomber ta position de garde, dis-je en pointant du doigt sa main prêtre à saisir son arme. Si je veux te tuer, ce n’est pas cette petite lame ridicule qui se mettra en travers de mon chemin ! »

Je m’approchais d’elle. Arrivé à sa hauteur, elle était encore plus insignifiante que de loin, je repris mon monologue.

« Dis-moi ce que tu veux pour calmer ta faim. J’irai le chercher et toi tu iras te changer. Je vais te donner des vêtements secs. Il faudra rincer les tiens, ils sont tachés de quelques gouttes de sang. Tu seras habiller comme moi, certes, mais c’est toujours mieux que des habits sales et mouillés. »

J’avais dit tout cela sur un ton posé en la regardant droit dans les yeux. Elle avait quelque chose d’envoûtant dans son regard. Autant, dans le moins, on ne pouvait déceler aucunes émotions, autant, dans les siens passaient tous ses sentiments. Je revins prêt du feu et tournai le rôti.

« Et pour répondre à tes mots… Je ne te donne pas d’ordre, juste des conseils. Je ne te considère pas comme un objet, tu ne te tiendrais pas debout ici sinon. »

Elle ne bougea pas. Sa main était toujours au-dessus de sa dague. Je me relevai et m’avançais encore une fois vers elle. Je pris sa dague dans un mouvement franc et rapide. La lame scintillait avec les reflets du soleil. Je fis un pas en arrière et mis la dague sur le côté de mon cou. Je l’enfonçais au trois quart dans ma chair. Le bruit de la lame déchirant la peau et les organes internes la fit tressaillir. Je retirai l’arme de mon cou et la lança dans le seau. Elle le transperça, vidant son contenu et se rinçant par la même occasion. Je lui montrais ma peau se refermant sur la plaie. En moins d’une minute, la blessure avait cicatrisé et aucune trace n’était apparue.

« Maintenant fais ce que je t’ai dit. Je t’attends. Nous partons après manger. »

Je me mis près du feu et commençai mon repas. Ayant passé toute ma vie, sur les terres de Silvermarth, seul, j’avais oublié toutes les bonnes manières… De dos, je ne devais pas avoir une allure très avenante… Je l’entendis me parler. Je me tournai plus la voir. Elle avait déchiré un morceau de ses vêtements pour y transporter sa nourriture. Je la détaillais de haut en bas. Je m’arrêtais sur sa jambe, il y avait un drôle de cicatrise. Je ne m’attardais pas plus longtemps dessus. Je me levai et allai chercher de quoi mettre ma viande. Je la fourrai dans un petit baluchon-maison que j’attachai à ma ceinture. J’éteignis le feu en jetant du sable dessus et camouflait mon « campement ».

« C’est bon. On part » dis-je d’un ton sec.

Sur le chemin, le silence s’imposa. Pour arriver aux Enfers, il fallait franchir les plaines de la mélancolie. J’avais envie de voler pour aller plus vite mais ça m’obligeait à porter la fille et je ne savais pas comment elle le prendrait. Je me décidais à entamer une légère conversation, au moins…

« Je t’emmène aux Enfers, ça tu le sais… mais il y a quelque chose que je ne t’ai pas précisé. Là-bas, les démons, et surtout mon père, le Roi, sont très nymphomanes et cruels! Pour éviter qu’il ne t’arrive quelque chose, il faut que tu portes un collier disant que tu es ma possesion… »

Je me doutais que ce dernier mot allait la faire se rebeller, mais je poursuivis :

« Je sais que ce n’est pas ce que tu aimerai, mais c’est le seul et unique moyen de survie ! Enfaite, je en te laisse pas vraiment le choix. Tu ne peux plus partir et situ viens il faut que tu sois à moi. Je te rassure ce ne sera que dans le but de te protéger. Ensuite tu seras libre… Il faudra juste qu’on se rapproche un peu plus devant certains démons. »

J’avais prononcé tout cela en la regardant, cherchant une réaction de sa part. J’attendis…